lundi 10 mai 2010

alfie























Bizarrement, je n'avais jamais vu ALFIE. Je connaissais son existence dans la filmo de Michael Caine et pour la chanson éponyme écrite par Burt Baccarach, mais je n'avais jamais eu l'opportunité de le voir. J'avais fui le remake de 2004, alors même que j'aime beaucoup Judd Law, car je pressentais que le compte n'y serait pas, Law étant un beau gosse et les producteurs américains. Une des surprises du film de Lewis Gilbert est que, justement, ni Caine, ni ses conquêtes ne sont glamoureuses à l'aune californienne – ou contemporaine. Le fait que, justement, celle qui va le plus toucher (et blesser) Alfie soit interprétée par Shelley Winters (*), actrice gironde accusant alors 46 ans au compteur, en dit long sur la volonté des producteurs de s'en tenir à une certaine vraisemblance.
Alfie drague et couche avec plein de filles (qu'il appelle des birds !) qui ne sont pas nécessairement très belles (à part la rousse Jane Asher qui joue l'auto-stoppeuse...), ni jeunes ; lui-même n'a rien de particulier et l'on constate vite que son vernis de classe et de distinction cache une origine prolétaire, un appart sordide, des manières de ruffian. 
Mais Alfie est sympathique et son apparent cynisme recouvre en fait une profonde humanité dont il ne sait que faire tant elle l'embarrasse. C'est bien donc l'autre surprise du film, pourtant réalisé par un vétéran des films de guerre et qui réalisa ensuite trois Bond (**) et qui signe-là un film doux-amer, qui oscille entre théâtralité (Alfie s'adresse directement au public en faisant des apartés), comédie et drame sociologique. C'est aussi un film sur l'Angleterre des années 60, un pays dans lequel l'avortement était encore un problème et qui n'était pas encore entré pleinement ni dans la modernité ni dans la morosité.
C'est surtout, outre la musique de Sonny Rollins, le chaînon indispensable pour bien comprendre ces fameuses sept années majeures dans la carrière de Caine. Resituons la question : Caine, après bien des panouilles, tant au cinéma qu'à la télévision, devient une star en tournant dans le ZULU de Cy Endfield en 1964 ; c'est un film patriotique assez académique mais les Britanniques vont en faire un symbole de la vaillance de leurs troupes. L'année suivante, il incarne Harry Palmer, un espion froid et méthodique aux antipodes de la suavité de Bond, dans THE ICPRESS FILE de Sydney J. Furie et c'est un succès. Caine rendossera le rôle en jouant dans FUNERAL IN BERLIN de Guy Hamilton.  Entre temps il y aura eu ALFIE qui l'installe fermement dans le panthéon britannique des séducteurs. Il enfonce le clou en 1969 en jouant dans THE ITALIAN JOB (***) de Peter Collinson et parachève sa légende en 1971 dans GET CARTER de Mike Hodges. Ces années-là sont pour moi les meilleures de Caine même si je reconnais que ses prestations récentes, notamment chez Nolan, sont indéniablement bonnes.
 
* elle a cette réplique savoureuse ("I've always been partial to the navy") quand on sait que, six ans plus tard, son personnage meurt noyée dans THE ADVENTURE OF THE POSEIDON !
** YOU ONLY LIVE TWICE en 1967, THE SPY WHO LOVED ME en1977 et MOONRAKERen 1979
*** A la différence de celui d'ALFIE, le remake de THE ITALIAN JOB réalisé par F. Gary Gray en 2003 est un film correct.

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