L'ILLUSIONNISTE est un film d'animation français réalisé en 2010 par Sylvain Chomet d'après un scénario original qu'il a adapté pour l'occasion en, notamment, transformant Prague en Edimburgh, car il vit et travaille dans la capitale écossaise.
Autant le dire d'emblée, ce film est un enchantement à deux titres : c'est un film de Tati (même si Tati n'est plus), dans son histoire, son héros, sa quasi-absence de dialogues, et sa mélancolie ; c'est aussi un formidable film d'animation qui ressemble vraiment à un travail à l'ancienne avec une fluidité dans les mouvements et un rendu des personnages qui m'ont rappelés les Disney de la grande époque.
Le travail est aussi cinématographique et donc de composition de cadre : ici, par exemple, on a à la fois une chanteuse émaciée attendant son tour tandis que les musiciens, comme notre héros, cherchent le lapin de ce dernier alors que l'électricien, lui, bricole. La lumière, les rideaux et la netteté (le fond est plus flou, moins soigné) créent une sensation de profondeur et d'espace. C'est un travail délibéré, bien articulé, même si en fait, le gag est fugitif et qu'on passe assez vite au plan suivant. C'est juste de la belle ouvrage.
Référence à LIMELIGHT de Chaplin (1952) en moins désespéré, c'est aussi un film sur une période de transition entre un ancien monde du théâtre et du music-hall et celui de la télévision, du rock et du cinéma. Ce n'est pas un hasard si les pseudos-Beatles semblent poursuivre notre héros, le renvoyant au rayon des antiquités et des prêteurs sur gages.
C'est un de mes plans préférés du film, car il louche (hommage ?) ouvertement vers le travail outrancier de Bill Plympton. La diva est excessive dans tous les sens du terme et notre héros a l'air totalement perdu dans ce cadre.
Mais lors de ce raôut il est repéré par un soulôt en kilt qui l'invite à venir faire des représentations en Ecosse où notre héros se rend, en train puis en bâteau.
L'Ecosse de 1959 n'a pas encore atteint totalement la modernité car on assiste à l'installation de la première ampoule électrique dans le pub où notre héros va jouer.
Le spectacle mais aussi la promesse de départ et d'exotisme poussent une jeune domestique, Alice, à ensuite emboîter le pas de notre héros ; ça sera la seconde partie de l'histoire. Mais je m'arrête un peu sur ce plan pour deux raisons : sa simplicité, sa banalité n'empêchent pas l'histoire de se dérouler. S'il y a un feu, c'est parce qu'elle l'a allumé, anticipant le froid, car elle avait vu des flocons tomber par la fenêtre. Ce qu'elle ne savait pas, c'était que ces flocons étaient les plumes, emportées par le vent, dont une femme garnissait un matelas. L'autre raison, c'est les chaussures. Le héros prend pitié de la jeune fille dont les chaussures sont en piteux état et lui offre une paire de souliers rouges. Ceux-là, à l'instar de ceux du film de Michael Powell et d'Emeric Pressburger, vont changer irrémédiablement la vie de celle-ci, la poussant à prendre une décision qu'elle devait, on s'en doute, gamberger depuis longtemps. Plus tard, ce sera un manteau, puis d'autres chaussures.... et ces demandes viendront à bout des finances du généreux héros qui s'effacera en outre devant la jeunesse.
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