vendredi 27 novembre 2009

paradoxalement vôtre

Un des aspects endémiquement excitant de ma profession d'enseignant (z'avez vu ce début de phrase ! ?) c'est cette propension que nous avons, consciemment ou non, à nous écouter parler. Faute d'oreillette relayant un son amplifié, je suis bien obligé d'être en permanence attentif à ce que je raconte (et fais, mais aussi ce que font et disent les élèves) de manière à ne pas dire tout et n'importe quoi d'autant que je ne lis pas un prompteur et improvise (en fonction des élèves, de leur humeur, des absents) une bonne partie de ma "partition". Du coup j'aime assez quand j'ai la sensation que ce que je leur dis fait, non seulement sens, mais dépasse largement les objectifs prévus et les emmène un peu plus loin que prévu ; enfin, disons ceux qui ont dans les yeux cet éclat qui me laisse accroire qu'ils le peuvent (les autres tant pis pour eux : c'est le darwinisme pédagogique). Ainsi, hier matin, en préambule à deux heures de sous-régime intellectuel (faire de la grammaire avec des première année de CAP mécanique et carrosserie est certes intéressant mais guère exaltant !), j'ai eu cours avec ma classe de première bac pro (là encore, de futurs mécaniciens, carrossiers et chômeurs).
J'aime beaucoup ces heures-là car je sais que, normalement, je vais pouvoir me marrer au moins une ou deux fois, parler d'un ou deux films (hier ça été le VOYAGE AU BOUT DE L'ENFER de Cimino) et leur apprendre deux ou trois choses qu'ils ne connaissent et les feront sortir de ma salle plus malins qu'ils n'y étaient rentrés (oui, je sais, je me la pête : et alors ?). Donc hier, alors qu'on continuait à discuter du fait-divers à l'origine de L'Adversaire d'Emmanuel Carrère (grâce auquel, mercredi, je leur avais aussi parlé de Philip K. Dick et des Misérables d'Hugo !) j'en suis venu à leur parler d'empathie (je n'ai pas été jusqu'à leur parler des androïdes dickiens...), de sympathie/antipathie et des sociopathes. De fait je n'aime rien tant que prendre du temps pour leur parler de vocabulaire, a fortiori de l'origine de certains mots qu'ils connaissent ou découvre (même si j'en soupçonne un ou deux de toujours savoir de quoi je parle mais de faire comme si).
Mais je me retrouve aussi souvent dans la situation où je mets en perspective un sujet qui les concerne en tâchant de leur exposer les différents aspects de la chose ; et tout du moins qu'il n'y a pas qu'un seul angle de compréhension. Ainsi, alors que j'écrivais au tableau, la surveillante est entrée pour prendre le billet d'appel. Comme je l'avais laissé aux bons soins de l'élève proche de la porte je ne me suis pas tout de suite retourné (je sais, c'est un manque de courtoisie). Mais je l'ai tout de même fait car j'ai senti qu'elle s'attardait.
Et pour cause ! elle tenait dans les mains les documents relatifs à la vaccination contre ce -que-vous-savez. Ne le cachons pas, je pense que c'est une fumisterie (certes mortelle pour certains malades mais avec un taux de mortalité inférieur à tant de causes de décès, y compris pathologiques que ça me donne le vertige) pour remplir les caisses des labos, mais devant les moues et les commentaires de beaucoup d'élèves je me suis surpris à leur conseiller de bien lire le document, à chercher dans la presse et sur internet pour mieux comprendre et étayer leur décision. Car c'est pas pour en rajouter sur la chose mais je pense que ça fait partie de mon taf et je l'aime aussi pour ça.

nb : un Pomplamoose pour la route, et en français de surcroît !


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